samedi 12 avril 2008

WE edition : Belgium is back

Alors, fondamentalement, Pieter De Crem et moi ne partageons pas les mêmes opinions politiques - notamment sur BHV. Voilà qui est dit.

Mais, cependant, "il en a" et j'aime bien son approche de la réforme de la défense. A cet égard, il vient de donner sa première vraie interview en français, en l'occurrence à La Libre - à lire ici.

Les questions n'étant pas nécessairement des plus pertinentes, je ne manque pas de poursuivre mon entreprise de harcèlement de son attaché de presse et ne désespère donc pas de pouvoir l'interviewer in extenso.

jeudi 10 avril 2008

Athéna en mode glandouille


En fait, je suis en vacances pour l'heure. De retour à Aix depuis le début de la semaine, j'en profite pour avancer sur les prochains DSI, pour fignoler le DSI n°37 (avec quelques belles suprises) et... sur mon prochain bouquin. Les travaux sur le précédent sont à présent quasiment terminés mais je ressent le besoin d'avancer.
Du coup, ma présence attire l'attention de Mr. et Mme. Rou-Rou - que les premiers lecteurs de ce blog connaissent déjà - qui passent dire bonjour deux-trois fois par jour, des fois que je n'aurais pas un bout de pain pour eux.
Bon, en fait, "Rou-rou", c'est vraiment idiot comme nom, pour des pigeons (qui tendent par ailleurs au poulet). Et vu leur conso de pain au 100 km, on a pensé à "goulaf" (= gloutons). Enfin, ceci dit, avouez tout de même qu'il a une certaine allure, non ?

Blogs en géopolitique et défense : la suite

La blogosphère stratégique francophone est entrée dans une phase décidément très dynamique. Pour preuve, l'arrivée dans le secteur du blog d'Olivier Kempf, que les lecteurs de DSI et de DN commencent à bien connaître. LCL commandant le 516ème RTrain, il est intervenu à de nombreuses reprises dans Défense Nationale (dont il est rédac'chef adjoint) sur l'évolution de l'OTAN et par deux fois dans le DSI. EGEA (Etudes Géopolitiques Européennes et Atlantiques) se spécialise plus particulièrement sur l'OTAN et la PESD.

Signalons également (et merci à François Duran de le faire remarquer sur le Théâtre des opérations) l'arrivée - depuis un petit temps déjà - de L'art de la défense et de la sécurité, de Jinmei, étudiant en droit. Il rend compte d'une série d'évolutions la plupart du temps centrées sur la France.

mercredi 9 avril 2008

Le Louise-Marie a été baptisé


Une deuxième frégate de la classe M a été délivrée à la marine belge et a été baptisée Louise-Marie par la Reine Paola. La F931 rejoint ainsi le Leopold 1er, complétant ainsi (une fois que le bâtiment sera opérationnel, la plateforme hélicoptère devant être allongée pour accueillir les NH90) le programme de renouvellement de la capacité "frégates" belge.
Plus longs que les Wielegen (122 mètres de long, contre 106 pour les anciennes frégates), avec un déplacement de 3.320 tonnes (contre 2.200 tonnes), elles sont notamment équipées d'un canon de 76 mm, de missiles mer-mer RGM-84 et antiaériens Sea Sparrow, de torpilles et d'un Goalkeeper. Equipées de deux moteurs diesel de 9.790 chevaux et d'une turbine à gaz de 33.800 chevaux, elles peuvent atteindre une vitesse de 30 nœuds.

mardi 8 avril 2008

Piraterie et stratégie navale : interview

Bernard Bridel, du 24 Heures (Suisse) m'a interviewé hier sur la question de la piraterie, de ses risques et des moyens de la contrer. Le résultat est en ligne sur le site du quotidien.

Lost in space

Ainsi, selon Secret Défense, le ministre français de la défense a indiqué qu'il faudra être "raisonnable" dans un domaine spatial où plusieurs opérationnels indiquent pourtant depuis un certain temps qu'une crise capacitaire ne devrait pas manquer de se produire. De fait, à partir de 2014, Helios IIA sera considéré comme en extension de vie.

Et d'indiquer que "Les satellites sont vulnérables. Est-ce vraiment la peine d'investir des milliards dans l'espace ?". Certes. Mais pas plus ou pas moins que les capacités spatiales américaines, indiennes, japonaises, chinoises ou russes. Et encore moins que des unités déployées en OPEX ou encore des navires de combat. Faut-il en déduire que MUSIS, le futur programme de satellite optique (qui sera analysé dans le prochain DSI, à paraître début mai) ou le nouveau système ROEM satellitaire vont passer à la trappe ?

Aussi si on ne peut pas complètement donner tort au ministre selon lequel "Une voiture, ce ne sont pas simplement des phares", la réalité est bien plus complexe. Le renseignement est un domaine où les analystes évoluent naturellement dans le brouillard - qu'il soit de la guerre, de la crise ou de la paix - et, finalement, n'a guère de ressemblance avec une voiture, aussi perfectionnée qu'elle soit. Et, de fait, tout le monde sait que dans l'hiver stratégique auquel nous devons nous préparer, les nuits sont parfois plus longues que les jours...

Reste néanmoins que le processus de génération du prochain Livre Blanc semble tourner au cacophonique. Démissions et indications selon lesquelles c'est la Revue Générale des Politiques Publiques (RGPP) qui dirige la réflexion stratégique - Carl von C. a d'ailleurs beaucoup à dire du récent rapport Bauer - pourraient ne constituer que la pointe de l'iceberg sur lequel les capacités françaises (et, partant, européennes) pourraient venir se fracasser.

La mise en place de la fonction "renseignement-anticipation", de ce point de vue, pouvait être considérée comme un signe encourageant (cf. DSI n°36). Mais, cependant et s'il est évident que le renseignement technologique doit céder le pas face au renseignement humain (Cf. l'article de Véronique sur la DRM dans le DSI de janvier), ce n'est pas une raison pour dégager des capacités que la France est l'une des seules en Europe a maîtriser. Car à parler d'Europe de la défense, il faut aussi savoir... assumer.

lundi 7 avril 2008

Le coup de g... du jour

Je tiens d'emblée à le préciser : c'est l'homme qui, dans ce post, s'exprime - pas l'analyste. Je viens de jeter un oeil sur le journal de France 2, tout en finissant mon repas. Le parcours chaotique de la flamme olympique dans Paris tient la vedette.

Un sportif - ne me demandez pas qui : à part le vélo, je suis aussi sportif que les pâtes que je viens de manger - déclare que "un manifestant à crié liberté pour le Tibet, il a été ceinturé". Alors, d'accord. Le Tibet n'a pas franchement toujours été un exemple démocratique. A mon époque, on avait encore des cours sur la civilisation chinoise à l'ULB et, de fait, le Tibet était théocratique - pas le genre de régime qui récolte ma sympathie.

Mais, enfin. A force de nous déclarer que non, les JO ne sont pas politiques et que la répression au Tibet, finalement, n'a rien à voir avec les Jeux, les petits rigolos du CIO sont en train de se fourrer un doigt grand comme la baie de Bo Hai dans les yeux. Oui, le JO sont politiques, ils le sont même plus pour la Chine qu'aucun occidental ne pourra jamais comprendre.

Et puis, regardons les choses en face : lorsque nos policiers (je suis peut-être Belge mais, après tout, je paie mes impôts dans une France qui est ma deuxième patrie) font le jeu de - quelle triste joie de reprendre ces mots - la clique à tonton Hu (tonton comme dans "tonton Makoud"), c'est peut-être qu'il y a comme un léger problème.

Certes, les jeux ne sont pas politiques, ils se réclament d'un idéal supérieur. Sauf quant on les transforme en quelque chose de politique et qu'ils sont instrumentalisés à ce point. Doit-on alors, au nom de cet idéal supérieur entre-temps traîné dans la boue, respecter quelque chose qui a perdu sa respectabilité ?

Alors, après, on peut vous faire porter de jolis petits badges indiquant que, malgré tout, le sport dépasse tout ça, que nous sommes pour la paix, que, finalement, on peut tout de même escompter qu'un certain nombre de valeurs passeront à travers les jeux... Bien sûr. Mais ce n'est pas le type qui a gueulé "Free Tibet" et qui a été ceinturé par des forces de police démocratiques qui a tiré le premier...

Je vous le dit, not in my name...

PS : l'analyste reprend le dessus : intéressant mouvement de netwar. Réponse de l'homme "hasta la victoria siempre" ;o)

Sale temps pour les bombardiers US

Après la perte d'un B-2 à Guam, un B-1B s'est crashé à Al Udeid, au Qatar. Cause encore inconnue.

La dissuasion, finalement, c'est comme les pizzas...


Pensez hybride (2)

Frank Hoffman fait partie de ces jeunes auteurs talentueux qui émergent aux Etats-Unis et qui, malgré leur jeunesse, ont un impact direct et important sur les nouvelles doctrines. En l’occurrence, Hoffman est lié aux Marines et a joué un rôle considérable dans l’émergence du concept de « guerre hybride » à présent au cœur des conceptions des « nuques de cuir » et, par effet-miroir, du « peristent conflict » de l’Army.

Dans Conflict in the 21st Century. The Rise of Hybrid Wars, une monographie assez dense, l’auteur explicite plus avant son concept et formalise conceptuellement ce qu’il considère comme la « guerre du futur ». Elle sera menée par des Etats ou des entités non-étatique, extrêmement violente (mais au cours d’opérations de stabilisation ou de rétablissement de la paix), complexe à mener, longue et sans aucune restriction.

Elle fera aussi feux de tous bois, les adversaires n’ayant plus aucune restriction d’ordre éthique, moral, juridique ou religieuse. Les moyens, dans cette optique, sont appelés à se diversifier. Ainsi, le « guerrier hybride » pourrait tout aussi bien se déplacer sur un âne tout en téléphonant avec un Turaya et en gardant, à côté de sa Kalashnikov vieille de 30 ans, un RPG-29. Aussi apocalyptique que Girard, la vision est néanmoins moins hallucinante (voire hallucinée).

Le propos est clair, les références nombreuses et le travail, précis et comprenant cette petite touche d’académisme – point trop n’en faut – qu’il manque souvent aux publications européennes continentales. Mais, en fait, Hoffman en revient de la sorte à une juste vision de ce que devrait être le spectre des conflits. Capitalisant sur Krulak – son « caporal stratégique » comme sa « guerre des trois pâtés de maisons » - l’auteur indique qu’il faudra tout savoir faire.

De ce point de vue, la guerre « traditionnelle » et conventionnelle ne sera pas éliminée. Mais l’émergence des guerres hybrides rend nettement plus complexe la planification comme la conduite des opérations. Il s’appuie ainsi sur l’expérience israélienne de 2006 – évidemment dérangeante parce qu’elle bouscule nos croyances (notre excessif appui sur la technologie comme sur nos vieilles structures présente tellement de signes d’une foi religieuse…) – et l’on regrettera sans doute qu’il n’ait pas pris en compte d’autres conflits.

Mais, chercheur pragmatique, Hoffman pousse plus loin son raisonnement et pose quelques réponses. L’entraînement et la formation sont cruciales. Le renseignement est absolument déterminant : plus que technologique, il doit être humain et culturel. L’agilité organisationnelle et matérielle – cette faculté d’adapter nos équipements pour des missions pour lesquels ils n’ont jamais été conçus – est considérée comme une posture de départ.

On le comprendra, Hoffman ouvre des portes qui seront dérangeantes pour nos armées. Mais qui ont également toutes les chances de devoir être empruntées. Aussi n’est-il pas étonnant de le voir batailler sur la notion de l’ethos : à la guerre, les perceptions sont plus importantes que les « effets cinétiques ».

Bucarest... et le reste

Bonjour l'Europe, il est 0820 et votre serviteur s'active sur des problèmes de stratégie navale théorique - rien de tel à l'heure du petit dej'. Vous allez me dire que ça ne fait pas votre affaire et vous aurriez bien raison.

En attendant, Rania Massoud de L'Orient/Le Jour (Beyrouth) m'a interviewé vendredi passé dans le cadre de la réalisation d'un article sur le sommet de Bucarest. Il peut-être lu en ligne.

L'ensemble des réponses qu'elle m'avait posé est quant à lui ici :

Quel est l'avenir de l'OTAN? L'Alliance, dès sa création, avait pour but de protéger l'Europe et l'Amérique du Nord contre toute attaque. Après les attentats du 11 Septembre, l'OTAN s'est vu attribué la mission de combattre en Afghanistan et d'assurer la formation de l'armée et des forces de sécurité afghanes - l'OTAN est pas ailleurs présent en Irak aussi. Est-il temps que les dirigeants réunis à Bucarest repensent l'avenir de l'Alliance?

JH : En fait, les débats sur les rôles et missions de l’OTAN n’ont jamais cessés. Si la menace soviétique a disparu, d’autres ont rapidement émergé : terrorismes, nationalismes « revendicatifs », risques environnementaux, etc. Aussi, Bucarest est surtout un sommet « opérationnel » entérinant un nouvel élargissement à la Croatie et à l’Albanie, permettant de faire avancer les débats sur les défenses antimissiles et de faire le point sur l’Afghanistan. Mais, de fait, les élargissements successifs et certaines propositions de parlementaires américains d’étendre l’Alliance à des pays comme l’Australie ou le Japon imposeront, à un moment, de redéfinir ce que doit être l’OTAN.

Quel est l'importance du rôle de l'OTAN aujourd'hui en Afghanistan? Les pays membres ont renforcé leur soutien, surtout la France. Mais est-ce suffisant? Et que pensez-vous du fait que le Pakistan, pays qui abrite sur sa frontière des Talibans, n'ai pas été invité au sommet?

JH : c’est un rôle de plus en plus important. On est passé d’un mandat sur Kaboul à un mandat sur l’ensemble du pays et de missions de reconstruction à des missions de reconstruction, de formation des forces afghanes et de combat/stabilisation. Les pays européens membres de l’OTAN sont, de ce point de vue, un réservoir de forces pour les Etats-Unis. Reste, effectivement, la question de savoir si c’est suffisant. En contre-insurrection, comme sur la frontière pakistanaise, ce ne sont pas quelques bataillons qui font la différence sur le terrain. L’essentiel est de savoir ce que l’on veut faire et avec quelle stratégie. Prises indépendamment, la reconstruction, la formation ou le combat sont naturellement insuffisantes. Il faut d’abord et avant tout gagner le soutien des populations et tout y concourt. Le facteur pakistanais est également un élément important, mais éminemment fragile. Inviter les Pakistanais, c’était aussi courir le risque de les voir « vendus » à l’OTAN et à déstabiliser un peu plus leurs assez peu confortables positions. Ceci dit, les contacts entre l’OTAN et le Pakistan sont fréquents.

Certains analystes prédisent que tout comme l'OTAN se trouve aujourd'hui en Afghanistan, il pourrait être également un jour impliqué au Moyen-Orient, surtout si cette région devienne un jour directement menaçante pour la sécurité européenne. Qu'en pensez-vous?

C’est une possibilité objective. Le sommet de Washington (1999) a entériné la possibilité pour l’OTAN de mener des opérations « hors-zone Article 5 » (soit en dehors des Etats-membres de l’OTAN).

Peut-on parler de marchandage au sommet, étant donné que les pays membres de l'OTAN ont refusé - pour le moment - l'adhésion de l'Ukraine et de la Géorgie et ont accepté, en contre partie, de soutenir le projet de bouclier antimissile US en Pologne? Que pensez-vous de l'attitude de la Russie qui se sent "encerclée" par l'influence occidentale?

Je ne pense pas qu’il s’agisse de « marchandage » à proprement parler : chaque Etat membre a son point de vue sur l’un ou l’autre dossier et il est un fait certain que la proposition de bouclier antimissile US peut paraître alléchante pour des Etats dont la compréhension des phénomènes militaires décline. Du point de vue russe cependant, ce bouclier est très mal vu et participe effectivement d’une perception d’encerclement. La Russie perd, peu à peu et en quelques années, un glacis protecteur qu’elle a mis des centaines d’années à constituer. La Russie est, par certains aspects « dans les cordes » et bombe le torse en multipliant des manœuvres militaires très voyantes, y compris à proximité immédiate des espaces aériens de l’OTAN. Cette posture, à terme, ne pourra que renforcer la volonté des alliés de disposer d’un bouclier… même s’il a de fortes probabilités d’être inefficace.