vendredi 12 février 2010

QDR 2010

Publiée tous les quatre ans, la Quadriennal Defense Review est l’un des documents majeurs de la politique de défense américaine : c’est elle qui définit les orientations prises par le Pentagone. C'est d'ailleurs étonnant que personne n'en parle...

Considérée comme « de temps de guerre », cette QDR définit deux grands objectifs : « Premièrement, continuer à rééquilibrer les capacités des forces armées américaines pour leur permettre de remporter les guerres actuelles, tout en se dotant des capacités requises pour faire face aux menaces futures. Deuxièmement, continuer à réformer les institutions et les procédures du Département pour mieux satisfaire aux besoins urgents des combattants ; acquérir des armes qui soient utilisables, réellement nécessaires et de prix raisonnable ; et veiller à ce que l’argent des contribuables soit dépensé sagement et judicieusement ».

Notez la thématique du rééquilibrage : en gros, il s'agit de la jouer "real full spectrum" et de réorienter une partie du dispositif sur les missions COIN (les forces spéciales sont d'ailleurs chouchoutées par cette QDR qui établit le niveau de 660 équipes comme objectif). Rien de bien neuf en réalité : il s'agit de la transcription de la position de Robert Gates, que le général Desportes avait analysé dans DSI il y a quelques mois.

Parmi les objectifs classiques – gagner les guerres d’aujourd’hui, y compris en contre-insurrection, prévenir les conflits, être capable de combattre dans une large gamme d’opérations, prévenir la prolifération d’armes de destruction massives ou encore utiliser efficacement le cyberespace – le lecteur remarquera qu’« empêcher et vaincre les agressions dans contextes d’anti-accès » est devenu l’un des défis recherchés.

Concrètement, la rhétorique fait assez clairement allusion à la Chine (même si elle n’est pas nommément citée) et au développement de ses capacités navales. Les capacités de frappe à longue distance mais aussi la préservation des capacités spatiales US sont vues, dans ce cadre, comme nécessaires.

Les relations internationales de défense sont également vues comme prioritaires, imposant notamment de nouveaux mécanismes permettant de transférer rapidement des technologies critiques aux Etats alliés. Le personnel militaire fait également l’objet d’une grande attention, tout comme – ce n’est pas une surprise – la réforme des procédures d’achat.

Robotique : une journée d'étude pour faire le point

Allez hop, à vos agendas : le CREC St Cyr organise le 8 mars à l'Ecole militaire (amphi Desvallières) une journée d'études sur la robotisation du champ de bataille, avec trois grandes thémas :

- Les robots sur le champ de bataille : retours d'expérience
- Perspectives technologiques et industrielles
- La Défense française face à la robotisation du champ de bataille

Alors, c'est ouvert, c'est gratuit (bande de veinards) mais il faut réserver : y'en aura pas pour tout le monde. Bref, programme et renseignements ici.

jeudi 11 février 2010

A propos des chars...

Je m'en rends compte maintenant mais Alex me posait une question : "que pensez-vous de la déclaration de De Crem selon laquelle "Si j’avais succombé aux réflexes corporatistes de l’armée, j’aurais investi dans les chars Léopard qui n’ont plus qu’une seule utilité : défiler le 21 juillet sur la Place royale. Mais avec lesquels on n’est rien à l’étranger en opération".

Et bien, ma réponse est très simple : le marché des chars de combat représente jusqu'en 2018 environ 6 500 engins neufs de par le monde à en croire les analyses US, principalement en Asie, ce qui est historiquement assez bas, c'est vrai.

Mais c'est une menace, à long terme - et tout militaire sait qu'on démentèle bien plus vite qu'on ne (ré)acquiert les savoirs-faire. Cette menace se double du fait que le char n'est plus seulement utilisé pour combattre d'autres chars : les Canadiens et quelques autres en Afghanistan le savent bien. Les derniers concepts d'emploi parus ici et là le montrent bien.

Donc, au risque d'une analyse pour le moins légère (ce qui n'exclut pas le bon sens), si nous sommes le seul pays européen de taille moyenne (la Slovénie ou l'Estonie sont des petits pays, pas une Belgique qui a autant d'habitants ou à peu près que la Grèce ou la Suède) à abandonner les chars, que l'on m'explique pourquoi les autres pays de taille moyenne les conservent, alors qu'ils sont tous affectés par des réductions budgétaires. Les réflexes corporatistes ?

Non, je ne crois pas. Une bonne analyse prospective, j'y crois plus.

Nb : petit addendum en forme de sourire : lorsqu'il a annulé les ubuesques AIV/90 mm, De Crem a justifié sa décision parce qu'il s'agissait de gravir le Mont Ventoux avec un tricycle. Et bien, je crains qu'il ne faille gravir ledit mont à plat-ventre !

mardi 9 février 2010

Jusque 4 Mistral commandés par la Russie ?

Finalement, la France a autorisé l’exportation d’un BPC de classe Mistral en Russie. Problème : Moscou en veut trois autres, de sorte qu’elle a transmit à la DGA une demande d’autorisation d’exportation supplémentaires. Mais la négociation ne manque pas de faire des vagues. Le secrétaire américain à la Défense a indiqué lors de sa rencontre avec Hervé Morin, le 8 février, a diplomatiquement indiqué qu’un bon échange de vues avait été mené. Au même moment toutefois, le porte-parole du Pentagone indiquait que « nos amis et alliés en Europe centrale sont clairement nerveux, en particulier la Géorgie… avec de bonnes raisons ».

A vrai dire, face à l'état des finances russes, je me demande si les demandes russes pour 3 autres navires ne relèvent pas d'une mise sous pression politique de la France, à peine rentrée dans l'OTAN. En somme, une stratégie d'affaiblissement indirect. En tout état de cause, le contrat sur le premier bâtiment pourrait être signé lors de la venue à Paris du Président russe, le 2 mars.

Addendum : Le ministre des affaires étrangères et de la défense lituanien s’est montré tout aussi réservé : sans condamner la vente, il espère que la Russie saura se montrer digne de la confiance que la France lui accorde. Son conseiller juridique indiquait quant à lui que la vente pourrait « violer le principe de solidarité entre Etats membres » de l’Union européenne.

Re-addendum : un camarade me demandait en quoi il y aurait test de la part de la Russie, via les 3 Mistral en plus. Simple : il s'agirait de déterminer si la France est le "mailon faible" de la solidarité otanienne. Bon, ce n'est qu'une hypothèse mais, au vu de la confusion autour des réelles intentions russes de passer à l'acte sur les trois autres navires et connaissant l'amour qu'a le Kremlin pour les échecs, ça laisse imaginer un certain nombre de choses...

DSI HS n°10 - spécial robotique militaire



DSI Hors Série n°10
Février-mars 2010 - En kiosque dès le 15 février
Editorial

Les fondamentaux

Quelques élémentaires de la robotique militaire
Par Joseph Henrotin, chargé de recherche au CAPRI

Guerre, système international et robotisation
Jean-Paul Hanon, Chercheur en relations internationales au CREC St Cyr ; maître de conférence à Sciences Po’ Paris.

Encadré : Innovation militaire et changement des rapports de force internationaux : le cas du GPS

Encadré : Robotique : quel leadership international ?

Systèmes autonomes : enjeux technologiques
Entretien avec Bernard Pikeroen, Directeur du groupe de recherche Sciences et Techniques de l’Information, Thales Research & Technology.

Robotique militaire : mode d’emploi
Par Jean-Jacques Mercier, spécialiste des questions de défense

Extrapolations. La robotisation de l’espace de bataille nous promet-elle une nouvelle révolution dans les affaires militaires ?
Par Christian Malis, normalien, docteur habilité en histoire, professeur associé à Saint Cyr

Intelligence artificielle et robotique
Entretien avec Noel Sharkey, professeur de robotique et d’intelligence artificielle à l’université de Sheffield

Quand la machine s’éveillera
Par le colonel Michel Goya, directeur d’études à l’IRSEM, titulaire de la chaire d'action terrestre de Saint-Cyr-Coëtquidan

Peut-on mener avec des robots une autre guerre que la guerre totale ?
Par Henri Hude, docteur ès lettres, directeur du pôle éthique et déontologie, CREC Saint Cyr

Encadré : Isaac Asimov et les trois lois de la robotique

Encadré : Robotique pression psychologique : le point de vue américain

La robotisation du champ de bataille : enjeux et défis juridiques
Par le lieutenant-Colonel Philippe Frin, enseignant-chercheur, spécialiste de droit des conflits armés, Ecoles de Saint-Cyr Coëtquidan, chargé d’enseignement à Sciences Po’ et Ronan Doaré, maître de conférences de droit public, directeur du Centre de Recherche des Ecoles de Saint-Cyr Coëtquidan

Encadré : des juristes au combat : le cas américain

France

France : une robotique de retard ?
Par Philippe Langloit, chargé de recherche au CAPRI

Encadré : Air, terre et mer

Robotique en France : la « feuille de route » de la DGA
Entretien avec Aurélien Godin, architecte « systèmes robotisés terrestres », DGA

Encadré : Les PEA en robotique de la DGA

UAV : cible SDM
Entretien avec Jean-François Henrio, directeur des systèmes de mission aéroportés, Thales

Drones navals : vers le travail en essaims
Entretien avec Thierry Brizard, directeur technique de la division navale, Thales

Encadré : Perspectives et orientations prospectives
Par Joël Morillon

Encadré : Ixsea et Sirenha

Talarion. Les MALE ambitions d'EADS
Par Jean-Louis Promé, journaliste spécialiste des questions de défense

Encadré : Harfang: comment éviter la rupture capacitaire ?

Encadré : Un Talarion dépendant de Washington ?

Sagem DS : du Sperwer au Patroller
Par Jean-Jacques Mercier, expert en systèmes d’armes

Encadré : SilMach et les concepts avancés

ECA : vers le succès commercial ?
Par Philippe Langloit, chargé de recherche au CAPRI

Bertin : en attendant les drones
Par Jean-Jacques Mercier, expert en questions de défense

Encadré. Tecknisolar ou la quête de l’endurance ultime

Les drones à voilure tournante, une réponse aux besoins tactiques ?
Par Lionel Chauprade, journaliste aéronautique, officier de réserve (ORSEM) dans l'armée de Terre

A l’étranger


La robotique, acteur de la contre-insurrection ?
Par Joseph Henrotin, chargé de recherche au CAPRI

Robotique et adversaires irréguliers : du bricolage à la bataille des narrations
Entretien avec Peter W. Singer, senior fellow à la Brookings Institution (Washington), auteur de Wired for War. The Robotics Revolution and the 21st Century Warfare

Le développement des systèmes militaires inhabités aux Etats-Unis : entre rationalité et rationalisation
Par Alain De Neve, doctorant en sciences politiques à l’Université catholique de Louvain (Centre d’Etudes des Crises et Conflits Internationaux) et membre du Réseau Multidisciplinaire d’Etudes Stratégiques (RMES – http://www.rmes.be).

Drones 2025 : La relève de la garde
Par le capitaine Grégory Boutherin, Centre de recherche de l’armée de l’air (CReA/EOAA) et Christophe Pajon, enseignant chercheur au Centre de recherche de l’armée de l’air (CReA/EOAA).

Robotique en Europe : tendances d’un horizon s’élargissant
Par Philippe Langloit, chargé de recherche au CAPRI

Robotique militaire : le retour d’expérience israélien
Par Philippe Langloit, chargé de recherche au CAPRI

Carte : Les drones MALE et HALE dans le monde

La prolifération robotique dans le monde
Par Olivier Zajec, Directeur adjoint, pôle prospective stratégique, CEIS