A lire, cet article du Monde portant sur l'émergence d'une nouvelle génération de djihadiste semblant suivre les lignes de ce que j'avais appelé, il y a deux ans (je pense, à vérifier) le risque méso-terroriste. Adieu les liens lourds, adieu les réseaux vulnérables, la radicalisation devient un phénomène individuel ou de petits groupes.
Autant de raisons de croire que les Lonewolfs décrits par T. Renard pourraient devenir une réelle menace, plus souple, plus fluide, plus discrète, sans doute moins létale pour nos sociétés mais nécessitant de prendre en compte la possibilité de nous voir attaquer. Avec, en contrepoint, l'impérieuse nécessité de développer non des dispositifs paranoïdes (au risque de nous faire perdre le peu de valeurs qu'il nous reste) mais bien des actions visant à renforcer la résilience de nos sociétés.
Cause principale : l'anomie, toujours l'anomie. Notre incapacité à intégrer, notre incapacité à offrir des modèles politiques et à "faire rêver", notre incapacité à disposer de valeurs stables permettant un réel vivre-ensemble (étonnement, très à la mode mais souvent mal compris...). Et pas (j'insiste pour certains commentateurs belges, notamment, tant la doxa officielle s'était enferrée dans une contradiction politiquement instrumentalisée mais largement démentie par la littérature), une question de richesse, de pauvreté ou d'éducation...
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6 commentaires:
Je suis d'accord avec votre analyse du facteur "pauvreté", et je veux bien vous suivre en partie sur l'anomie, mais pourquoi refuser d'inclure la variable "politique étrangère" ? Je sais qu'on a démantelé des cellules terroristes dans plusieurs Etats occidentaux ces dernières années, mais ce n'est quand même pas un hasard si les attentats majeurs ont eu lieu aux USA, dans l'Espagne d'Aznar et à Londres. Nier le lien entre ces attentats et les engagements militaires de ces pays relève du politiquement correct.
On peut évidemment affirmer que la variable politique étrangère ne peut pas être inclue dans la solution, puisque l'on ne peut pas mener sa diplomatie en fonction des menaces terroristes. Par contre, s'il s'agit uniquement d'établir les causes du phénomène terroriste, se contenter de parler d'anomie revient à passer à côté de l'essentiel.
Je me souviens des articles traitant du méso-terrorisme il y a quelques années. Je ne savais pas vous en étiez l'inventeur.
J'aime beaucoup ce concept, et reste stupéfait devant la menace insurmontable qu'il représente pour les services de sécurité de nos sociétés.
Un point : quand vous écrivez "sans doute moins létale", je suis moins optimiste que vous, sur le long terme. Un homme seul disposera sans doute de capacités de destruction énormes dans un avenir proche.
Une question : incluez-vous les "déséquilibrés" qui flinguent des juifs dans une agence de voyage, comme cela a été le cas aux USA il y a quelques années, (ou, plus généralement les tireurs fous) dans le méso-terrorisme ?
Après tout, on les qualifie de déséquilibrés, par opposition à des terroristes, sous-entendus "équilibrés", ce qui est sujet à caution.
Dernier point : je crains que le monde imaginé dans Equilibrium paraisse une réponse adéquate au problème dans quelques décennies.
J'ajouterai quand même un bémol: pas "uniquement" une question de richesse, de pauvreté et d'éducation. Sans tomber dans le marxisme primaire, j'ai du mal à croire qu'une société dont le coefficient de Gini se dégrade d'année en année va vers une intégration plus heureuse, une résilience plus forte et un vouloir-vivre collectif plus puissant.
Je suis d'accord en tous cas pour dénoncer le "réflexe sécuritaire" qui traine l'Occident vers ses plus bas instincts, loin de ses valeurs morales affichées. Mais ce réflexe est plus simple à "expliquer" aux foules, et il est aussi sans doute recherché pour le maintien d'un certain couvercle social rendu instable justement par les inégalités. L'argument de la lutte contre le terrorisme est devenu l'utlima ratio des gouvernants en occident pour faire passer toutes les pilules, on ne peut le nier.
Enfin, je vous pose une question Joseph: pour ces "méso terroristes", le terrorisme est-il toujours une méthode, ou devient-il "le but" ? Faut-il remettre en cause les classifications de J. Baud sur la "guerre asymétrique" ?
Il y a t'il un rapport entre le passage d’Al Qaeda un peu centralisée et directive d'il y a quelques années quasi véritable organisation et l'arrivée aujourd'hui d'Al Qaeda en forme de label dont beaucoup se revendiquent mais dont peu ont de véritables contacts?
Cette facilité de s'inscrire dans la grande branche spectaculaire du terrorisme mondial qui a un peu de renommée, ne permet t'elle pas alors l'appariation de ces "loups solitaires" attirés par la facilité de donner une image forte à leur action surtout lorsque l'on sait que la préparation d'attentats de grande envergure ne nécessite plus de grands moyens (cf. étude sur les attentats de Madrid n'ayant pas couté plus de 10.000 euro de mémoire)?
Il y a quelque chose qui me semble paradoxal (du haut d'une ignorance que j'admets volontiers).
Comment peut-on parler d'anomie alors que précisément souvent, la revendication de ces terroriste est le refus des valeurs (et des normes) occidentales?
Quel "rêve" de société offrir à quelqu'un qui ne veut pas de telle société, ou qui en refuse les fondements?
On peut aussi relever un autre paradoxe: l'auto-alimentaion de la cette déchéance des normes par l'occident lui-même: guantanamo, les guerres mal vendues (Irak), lois liberticides, etc.
Comment concilier tout cela?
Alex
J'ai posté une réaction à cet article sur mon blog...
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