J'ai reçu ce matin un commentaire que je crois utile de placer en exergue et auquel je me permettrai ensuite de répondre :
"C'est avec attention que j 'ai pu prendre connaissance des réactions et de la thèse développées sur votre blog ayant trait au "non-Etat" pour ce qui concerne la Belgique. Parlementaire francophone belge entamant ma seconde législature au parlement fédéral, il est certain que si je peux ressentir un fossé grandissant entre la classe politique flamande et francophone hormis pour quelques exceptions, la bourde de monsieur Leterme, premier ministre belge "en devenir", a pu souligner de profondes différences également dans les réactions des opinions publiques francophones et néerlandophones. Et ceci me semble plus fondamental. Côté francophone, on ne trouve pas d'excuses à monsieur Leterme pour avoir confondu "Brabançonne" et "Marseillaise", sinon à reconnaître que les paroles de ces deux hymnes sont en français. On dira dans l'opinion publique et médiatique flamande que c'est sans doute une faute mais que les francophones "exagèrent vraiment" en montant en épingle ce pseudo-événement au point d'en faire une affaire d'Etat. Le peuple semble divisé. Là, où bon nombre de francophones diront ou écriront que partout ailleurs dans le monde, un futur premier ministre commettant pareille bévue serait sommé "d'aller se rhabiller", les néerlandophones feront le gros dos et ironiseront plutôt… le peuple belge n'est pas uni sur la question, on ne parvient même pas à s'accorder sur l'idée que le café matinal de Leterme devrait être plus corsé. A défaut d'une grande culture, cela pourrait lui rendre ses réflexes…
Il n'en demeure pas moins que l'information a fait le tour du monde, ou à peu près. Dans toutes les langues, on a bien ri. Les belges, au delà de la France ont bien fait rire, il n'est pas loin le temps où les blagues belges ne seront plus uniquement racontées par des français. Mais le Belge s'en fiche de faire rire sur son nom. Et cela fait sans doute partie intégrante du problème ; pour être blessé par la moquerie, il faut être touché dans sa fierté.., le belge est-il suffisamment fier de l'être? Davantage les francophones sans doute, au vu de leurs réactions et qui dans un récent sondage n'expriment pas leur confiance à Monsieur Leterme, à l'inverse des flamands. La conclusion à porter à ce débat tient sans doute en quelques lignes. L'Etat devrait idéalement reposer sur un sentiment national fort et partagé, empreint de culture, d'histoire et de projets communs. A défaut, l'attachement aux symboles tel que celui sur lequel nous avons débattus ne tient plus. D'autres représentations collectives que l'Etat prennent alors naturellement le relais. S'est-on déjà interrogé sur le sens qui fait revendiquer, en masse, aux Belges leur identité et leur attachement à l'Union européenne. Compensent-t- ils affectivement? Et sans lien avec une autre représentation collective, le Belge sera-t-il plus empreint à revenir à une autre référence sans hymnes, sans tambours ni trompettes, peut-être plus individuelle, d'une autre grandeur. Denis DucarmeDéputé "
Je suis honoré de me voir ainsi lu.
Malheureusement, suis-je tenté de dire, la gaffe d'Yves Leterme n'a fait rire personne. Vu de France où je travaille, son comportement a plutôt suscité l'incrédulité, voire, à atterré commentateurs et citoyens. Nous sommes au-delà de la dernière blague belge. Mais, si je puis me permettre, je pense que toute cette affaire renvoie plus au symptôme d'un délitement en profondeur qu’à un épiphénomène – même si, évidemment, notre futur premier ministre devrait faire plus attention au dosage de son café.
Et de fait, je pense que sur ce que nous pourrions qualifier « d’effondrement des symboles identitaires » va sans doute générer d’autres modalités de socialisation. Celle de l’Etat n’est, après tout, qu’une parmi d’autres. Si elle peut être structurante des autres (que serait l’identité flamande s’il n’y avait eu la Belgique ? En retour, que serait l’identité wallonne s’il n’y avait eu l’identité flamande ? Paradoxalement, l’identité bruxelloise « zinneke », qui ne s’est pas construite par opposition, me semble tellement plus stable), elle pourrait n’être aussi que transitoire. L’Etat post-westphalien, en tant que forme d’organisation politique régulée et détenteur du monopole de la violence légitime, n’est, après tout, que post-westphalien. Or, des formes d’organisation politiques existaient bien avant 1648.
De ce point de vue, sans doute la Belgique devra-t-elle évoluer tôt ou tard vers une forme confédérative, où les compétences communes – affaires étrangères ou défense – ne seront guère là que pour créer des économies d’échelle ou permettre de garder un label « Belgique » qui reste très apprécié à l’étranger. Si l’on peut regretter cette évolution, on ne peut forcer des groupes sociaux à partager les mêmes valeurs, même si, sans doute, la sociologie flamande comme celle des identités est plus complexe qu’on tend à le faire croire. A cet égard, sans doute certains devront-ils comprendre qu’exister ne signifie pas s’opposer – un comportement très adolescent – et qu’il n’est nulle identité plus stable – et, dans un certain sens, plus forte - que celle qui accepte et qui s’ouvre à autrui, ne craignant pas de se mélanger.
jeudi 26 juillet 2007
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire