samedi 22 septembre 2007

Du côté des lectures (6)

J'ai reçu avant-hier Introduction à la stratégie, de Vincent Desportes et Jean-François Phélizon, que j'ai d'ailleurs presque terminé. Encore un livre d'introduction ? Et bien non. On ne maîtrise jamais aussi mal une discipline que les fondements et les implications de ses élémentaires. Et les auteurs, en travaillant par un dialogue continu entre eux, on produit un ouvrage que quiconque s'intéresse à la stratégie devra avoir lu. Il y a beaucoup de choses à en dire, je me réserve pour une critique de lecture. En attendant, il ne devrait pas tarder à être disponible (il ne l'est pas encore sur Amazon).

jeudi 20 septembre 2007

Quel dimensionnement pour la Marine nationale ? (3)

Nous transmettons de temps à autre un article de T&A à notre partenaire ASD-Network, afin qu'il puisse le mettre gratuitement en ligne. En l'occurrence, il s'agit ici de l'article "Quel dimensionnement pour la Marine nationale ?", paru dans le Technologie & Armement d'août-septembre et dont il avait été question sur ce blog.

Il semble qu'il ait aussi suscité, avec les contributions de J-D. Merchet, un article sur Mer et Marine qui m'a été signalé par MB et dont la logique est implacable. Si ce n'est, toutefois, deux précisions qui s'imposent. La première se résume à un chiffre : 40 milliards, de déficit d'équipement s'entend. Or, si l'on conçoit parfaitement qu'une marine soit absolument stratégique - c'est même la thématique d'un ouvrage que je compte faire paraître l'an prochain - elle ne l'est pas plus que d'autres armées, l'air et la terre, s'entend. Chacune à son rôle et le fait est que le gouvernement ne semble pas disposé à augmenter de 43% le budget d'équipement des armées afin de satisfaire le Modèle 2015.

Ce qui m'amène à une deuxième précision : en tant que scientifique, un tel décalage entre besoins et budgets, entre désirs stratégiques et volonté politique (non pas qu'elle soit inexistante mais bien qu'elle n'aboutisse pas à augmenter les budgets) m'amène à me questionner sur la meilleure réalisation possible - avec ou sans 2ème PA - tenant compte des variables politiques desquelles le militaire ne peut en aucun cas être déconnecté. A cet égard, dessiner des scénarios fait partie de mon travail de scientifique - et tant qu'à faire, de journaliste spécialisé. Il s'ensuit que je ne me sens pas particulièrement visé comme producteur d'"intox" visant à satisfaire quelque dessein malfaisant à l'égard de la marine ou des industriels.

C'est même précisément ce pourquoi j'ai précisé qu'il s'agissait de scénarios. Qu'il me soit également permis d'indiquer que si je n'avais pas connaissance des réflexions de la Marine au moment de la rédaction de mes scénarios début juillet, les sources données par JD Merchet doivent sûrement exister. Je doute que les miennes soient identiques mais, début septembre, j'ai également eu connaissance de réflexions en ce sens dans la Marine. Je doute donc que l'on soit dans le registre de l'intox.

Cette fois, c'est la fin...

J'ai pensé à appeler ce post "chronique d'un fascisme émergent". Je n'en ai pas le coeur...

(Source : DH) : Des P.-V. pour les non-Flamands
(20/09/2007)
La police de Zaventem traumatise les non-néerlandophones de la commune
ZAVENTEM Mario, 11 ans, nettoyait, le 9 septembre, la voiture de ses parents à Woluwe-Saint-Étienne, située sur le territoire de Zaventem, quand deux agents de police néerlandophones lui ont signifié, en flamand, que la voiture, garée à moitié sur le trottoir, devait bouger. Le garçon, Italien d'origine, n'a pas compris. Il va à l'école européenne, comprend donc l'anglais, le français et l'italien... mais pas le néerlandais. Quelques secondes plus tard, il arrive en pleurant chez sa mère, qui va voir dehors ce qui se passe, passablement énervée que des agents de quartier se permettent d'effrayer son fils.
Mais Mme Grazioso, Italienne elle aussi, et par ailleurs employée comme son mari à la Commission européenne, ne comprend pas plus le flamand que son fils ou que son mari. "Nous n'en avons pas besoin et nous parlons dans notre maison la langue que nous voulons...", expliquent-ils logiquement.
Les deux policiers leur expliquent alors que s'ils ne bougent pas leur voiture dans les cinq minutes, ils ont une amende. Et leur demandent pourquoi, en 11 ans d'existence à Zaventem, ils n'ont jamais appris le néerlandais. "Si je vais en Italie, j'apprends l'italien", lance l'un d'entre eux. "Mais jamais on ne vous demandera d'apprendre le napolitain à Naples" , lui rétorque la dame. S'ensuit un débat linguistique qui n'est pas pour plaire à Mme Grazioso. Mais le mari calme la situation, bouge la voiture et les deux agents finissent par s'en aller, laissant là le couple sous le choc et leur petit garçon en pleurs.
Leur amende est arrivée hier, estimée entre 200 et 2.000 euros. La même est parvenue au voisin, qui lui aussi était mal parqué ce jour-là. Sauf que... la police détaille par écrit l'aventure au voisin, qualifiant Mme Grazioso d'hystérique. "Un comble, s'exclame-t-elle. Nous avons la certitude que ce P.-V. nous punit de notre faible niveau en néerlandais. C'est totalement aberrant. Nous sommes des ressortissants européens ! Et depuis, notre fils n'ose plus aller dehors, de peur de tomber à nouveau sur la police qui l'a traumatisé !"

mercredi 19 septembre 2007

Iran - les résultats des frappes

Voilà, le papier écrit par le correspondant à Bruxelles de l'AFP est sorti. Vous pouvez le trouver ici. S'il est toujours un peu frustrant de voir ses idées ainsi compressées, le gros de l'interview passée hier s'y retrouve, à une petite nuance près : celle de la "wildcard" israélienne. En fait, il semble bien qu'il y ait une réelle prise de conscience du risque d'une action unilatérale israélienne (une question sur laquelle je m'étais déjà exprimé) au niveau des gouvernements européens et américains (à tel point que l'on peut se demander si la hausse de l'aide US à Israël pourrait bien ne pas être uniquement due au seul méga-contrat passé avec les Saoudiens).

Dans cette optique, plus la pression est mise sur Téhéran, moins grand est le risque d'une intervention israélienne et là est sans doute toute la finalité : garder le contrôle, même si on peut donner l'impression de le perdre. Le "jeu", certes, semble dangereux. Mais nos perceptions nous trahissent aussi. Parler de guerre n'est, en effet, rien comparé au fait de la faire. Ou de voir les autres en entamer une dont les conséquences ne peuvent être maîtrisées... parce que l'on est évincé du jeu.

Le Foxhound repointe son nez

Après les questionnements sur la livraison de Mig-31 à la Syrie, on apprend que 10 des 50 Mig-31 Foxhound kazakh devraient connaître un processus de modernisation en profondeur. But de la manoeuvre, à en suivre certains analystes, à la fois disposer d'une capacité de supériorité aérienne rénovée mais aussi de la possibilité d'utiliser ces puissants appareils dans des missions de lancement de micro-fusées, à l'instar du tandem B-52/Pegasus.

Arabie saoudite : contrat signé

Des officiels saoudiens confirment bien la signature du contrat d'achat de 72 Eurofighter Typhoon, une transaction qui avait été remise en question par la justice britannique pour cause de corruption (cependant endémique dès lors que l'on parle de contrats d'armements vers le Golfe où il est normal non de "graisser la patte" mais bien de "faire des petits cadeaux"). Le "projet Salam" s'élève à 4,430 milliards de Livres Sterling.

mardi 18 septembre 2007

Interviews en pagaille

Il y a des jours comme ça. Ca a commencé avec l'AFP sur la question des déclarations de B. Kouchner sur l'Iran - l'occasion de recontextualiser un discours dont n'avait été extrait que la fin et ou, effectivement, la force est le regis ultima ratio - et d'examiner la faisabilité technique des frappes (et où le premier qui frappera pourrait ne pas être celui que l'on croit)... comme des ripostes possibles.

Ca a continué avec Blackwater pour BFM, sur la question de la place prise par la privatisation des fonctions de défense et des dérives qu'elle porte. Avec 10 minutes d'antenne, j'ai été assez royalement servi, avec l'occasion d'entrer en profondeur dans le sujet... Et ça s'est terminé par une interview pour le quotidien L'Echo, sur la même question, à paraître demain.

Et le boulot dans tout ça ? Et bien, disons juste que le DSI d'octobre est quasimment bouclé et que celui de novembre est en route. J'ai donc bien mérité un petit apéro accompagné d'une finition de chapitre sur la théorie du combat urbain ;o)

lundi 17 septembre 2007

France : retour au classicisme diplomatique ?

En indiquant le 16 septembre qu’à l’égard de l’Iran, qu’il fallait « se préparer au pire » soit « à la guerre », le ministre français des affaires étrangères renouait – sur fond de mini-polémique quant à la dureté de propos – avec la conception classique de la diplomatie. En l’occurrence, ce « modèle classique » impose de se mettre en position de force avant la conduite d’une négociation. Aussi, si plusieurs observateurs interpréteront ce positionnement comme tel, il intervient également après la prise de position allemande, à l’époque de Gerhard Schröder, indiquant que toute option impliquant la force était écartée.

Sa déclaration avait alors été critiquée par une partie de la communauté des experts, indiquant que le chancelier allemand minait la crédibilité des pressions exercées ou planifiées à l’égard de Téhéran. Kouchner, de ce point de vue, pourrait avoir remis les Européens en piste, le ministre indiquant cependant dans la foulée de sa déclaration que la diplomatie restait « la meilleure option » et que « l’armée française n’est pas pour le moment associée à quoi que ce soit ni à aucune manoeuvre que ce soit ».

On se rappellera néanmoins que les dernières manœuvres Agapanthe, impliquant le porte-avions Charles de Gaulle, s’étaient déroulée dans le Golfe persique et qu’elle ont participé, non-officiellement bien sûr, d’une certaine pression sur Téhéran.

Dans le même temps, l’intervention du ministre des affaires étrangères se produit peu après une suite de déclarations portant sur le retour du Moyen Orient dans la logique diplomatico-militaire française. Après la visite en Irak du ministre des affaires étrangères et le discours aux ambassadeurs du Président de la République, le ministre français de la défense indiquait dans son discours de clôture des Universités d’été de la Défense que la région constituait la seconde priorité géographique de la France, après l’Europe.

Reste, toutefois, que le retour français sur la scène moyen-orientale se produit aussi dans un contexte de questionnements intra-européens alors que, justement, Paris entend mettre l’Europe en ordre de marche face à Téhéran. En effet, poursuivant sur sa lancée en faveur d’une Europe de la défense, la rencontre du 10 septembre entre Nicolas Sarkozy et Angela Merkel a notamment porté sur la coopération allemande à la dissuasion nucléaire française… et le Français d’essuyer un refus.

On le comprendra, le dossier iranien, en plus d’être un test pour la nouvelle posture diplomatique française, pourrait également en être un pour les efforts de Sarkozy en faveur d’une PESD mais aussi pour l’évolution future des relations franco-allemandes, pour une relation franco-américaine en pleine reconfiguration (sans toutefois que l’on ne puisse parler d’alignement sur Washington, ce qui semble très excessif) mais aussi pour un rapprochement avec la Grande-Bretagne qui semble absolument indispensable à toute PESD « remusclée ».

Interview : "se préparer au pire"

Pour ceux qui sont en ligne et qui ont la possibilité d'écouter RMC, on m'a invité à m'exprimer sur la question des déclaration de B. Kouchner sur l'Iran ("se préparer au pire") d'ici 1020.

dimanche 16 septembre 2007

Une explosion des blogs francophones de défense ?

Depuis quelques temps se produit un phénomène pour le moins intéressant : l'explosion du nombre de blogs francophones touchant aux questions internationales et de défense. Certes, les centres de recherche avaient leurs sites web et seront suivi de forums de discussion comme Air-défense ou Géostratégique, pour ne citer que les plus interarmes, sans encore compter une série de sites variablement spécialisés comme - la liste n'est pas exhaustive - meretmarine, Red-stars ou Corlobe.

Mais les blogs sont apparus plus récemment. Honneur au (jeune) patriarche du mouvement, celui de Ludovic Monnerat remonte à fin 2004 et sera suivi du blog de la Revue Militaire Suisse qui, pour être la plus ancienne d'Europe, n'est pas la moins moderne. Et puis, plus rien (si ce n'est un frémissement canadien : celui d'un élève-officier et le blog du général de Richoufftz, malheureusement trop peu mis à jour). Jusqu'à juin-juillet 2007 où sont apparus le mien, Secret Défense puis deux autres. Celui de François Duran est plus axé "stratégie" et propose des réflexions avec lesquelles je ne suis pas toujours d'accord (par principe, je ne suis jamais toujours d'accord) qui méritent le coup d'oeil, l'auteur ayant la bonne idée de nourrir ses réflexions par une lecture qui semble assidue. "Petit dernier", le Military blog propose une série de réflexions tirées là aussi des lectures de l'auteur.

Le mouvement reste toutefois timide comparativement à ce qui se passe aux Etats-Unis. Dernièrement, je suis tombé sur l'Army of Dude, le blog pas très politiquement correct d'un Grunt américain engagé en Irak. David Axe, journaliste spécialisé et fréquemment engagé sur des théâtres, est également hautement recommandé. Si je ne vais pas en dresser la liste exhaustive ici, force est cependant de constater l'effrayante asymétrie entre francophones.

"Effrayante" dans la mesure où les blogs sont de bons indicateurs de la liberté d'expression existant dans un pays. Et si des Européens se sont offusqués de ce que le Pentagone donnait des recommandations aux "Milbloggers" engagés en Irak et en Afghanistan, force est de constater que l'autocensure peut régner beaucoup plus de notre côté de l'Atlantique que de l'autre... Question de culture ? De poids de la hiérarchie ? D'accès, pour les "opérationnels" au matériel (et à la bande passante) ? De peur du qu'en dira-t'on (un officier me confiait qu'un équivalent européen de Ralph Peters, autant écouté que critiqué à Washington, aurait toutes les chances de voir son plan de carrière sérieusement compromis pour cause de non-conformisme) ?