vendredi 20 juillet 2007

Comme un petit vent d'est




Deux photos du missile DF-25 (Dong Feng, vent d'est) sont apparues sur le net, montrant le missile et son TEL puis le lancement du missile lui-même. En théorie, le DF-25 avait été annulé dans les années 90. Les engins montrés seraient spécifiquement dédiés à des frappes conventionnelles. On notera que le dernier étage présente certaines similitudes avec celui du Pershing II et de l'Agni II indien. Dans ces deux cas, les ogives disposent d'un radar permettant d'assurer un guidage terminal offrant une ECP inférieure à 20 m.
Il est probable que la Chine cherche à se doter de telles technologies, une des grandes caractéristiques de son processus de modernisation militaires étant de chercher à se doter d'armes de précision utilisables dans des stratégies de décapitation des infrastructures de communication. Autre avantage d'un tel système de guidage, la capacité à manoeuvrer des ogives est de loin supérieure à celle offerte par des systèmes de guidage plus classiques.

jeudi 19 juillet 2007

"Peace" mission 2007

La partie "russe" de Peace mission 2007 va commencer fin juillet nous apprend ITAR-TASS :

MOSCOW, July 16 (Itar-Tass) - Over 90 aircraft of the Russian and Chinese Air Force will take part in the antiterrorist manoeuvres of the Shanghai Cooperation Organisation (SCO) member states Peace Mission 2007 that will be held in the Chelyabinsk region in the period from August 9 to 17, Commander-in-Chief of the Russian Air Force Colonel-General Alexander Zelin told journalists on Monday."A total of 92 aircraft will be engaged in the Peace Mission 2007 exercise," the commander specified. "From China - six military-transport aviation planes Ilyushin-76, eight fighter-bombers JH-7A, 16 JG-9W and 16 Mi-17 helicopters of the army aviation. Russia will engage in the manoeuvres six Ilyushin-76 planes, nine Su-25 fighter jets, 13 Mi-24 and 18 Mi-8 helicopters," according to Zelin."Aviation will be engaged in seven episodes during the exercise. It will conduct reconnaissance, landing of airmobile task force units and their engagement with simulated enemy," said the commander. "The Il-76 planes are expected to put on the ground over 20 machinery units and drop 200 paratroopers," he added."The arrival of first planes from China at Shagol and Uprun airdromes is planned for July 27-28. One of the Chinese Il-76 planes has a woman commander," the Russian AF commander-in-chief noted.

En attendant, la "partie chinoise" des "exercices" a déjà commencé, semble-t-il d'après un de nos correspondants, à proximité immédiate de la frontière afghane. Les Chinois auraient engagé des chars, des blindés, de l'artillerie et de l'aviation dans la zone dans ce qui apparaît plus comme des opérations antiterroristes en bonne et due forme que comme un exercice. De fait, si la rebéillion Ouïghoure n'est pas franchement djihadiste, Pékin a toujours évoqué un risque en la matière afin de légitimer un certain nombre d'actions menées et la perspective des JO doit sans doute faire faire à Pékin quelques pirouettes rhétoriques.

Il faut également signaler que les manoeuvres "Peace mission" n'ont jamais été très "pacifiques", malgré des discours mettant en évidence les aspects de maintien de la paix. L'an passé, les manoeuvres impliquaient un débarquement en bonne et due forme avec utilisation de l'aviation et de l'artillerie. Mené conjointement avec la Russie, ledit débarquement avait sucité des inquiétudes aux Etats-Unis et à Taiwan.

Coquillages et crustacés...

Au vu des grandes chaleurs qui touchent actuellement la Provence, c'est en bermuda que votre serviteur vous écrit. Sympathique habitude qui me fait me rappeler que les "grands" de la RAND corporation avaient l'habitude de discuter stratégie nucléaire assis sur le sol.

Mais comme dans le cas de la susdite institution, mon état de relaxation vestimentaire n'empêche pas l'équipe de bosser ferme sur un triple bouclage. Ayant reçu quelques courriers nous demandant ce qu'il y avait au programme dans les prochains DSI et T&A, je me dis que je serais bien ingrat de voir mes lecteurs supporter mes billets sans rien leur donner en contrepartie.

Si je ne dévoile pas tout, le DSI de septembre sera bien chargé :

- 230 brèves d'informations ;
- des fiches techniques sur le CV90, les destroyers F-100 et les AC-130.
- un article de ma plume sur la marine japonaise, ses qualités (nombreuses) et les défis qui l'attendent (tout aussi nombreux). Le monde de la presse francophone de défense hésite souvent à traiter de l'Asie alors qu'après tout, elle couvre peu ou prou un bon 50% du globe. On s'efforce de rattraper le retard comme on peut !
- pour le reste et bien... disons que nos débats sur la tactique et la stratégie reprennent. Avec des points de vue et des analystes qui ont un franc-parler à la hauteur de leurs compétences.

Quelques points de vue bien intéressants également dans le T&A (disponible dès le 16 août) : sur l'Exocet Block3 d'abord, qui induit une petite révolution dans le monde de missiles certes antinavires... mais de plus en plus polyvalents, ou sur le VBCI. Le Stryker est également passé à la loupe comme d'autres sujets pour le moins tèrs chaud du moment (je n'en dit pas plus : un peu de suspense, que diable !)

Manipulation Inc.

C'est bien connu, le conflit israélo-palestinien est un excellent cas d'étude en matière d'opérations médiatiques. Nous en avons ici une nouvelle illustration : selon ce qui est pompeusement qualifié d'article d'information, Tsahal utiliserait des obus à l'uranium appauvri dans un "génocide" à Gaza. Alors, bon. Mettons les choses au point. Oui, le soldat sur la photo a bien un "obus à dard" (au passage, on appelle ça un APFSDS ou, plus communément un obus-flèche) sur l'épaule. Mais :

1) Quelle est la preuve qu'il soit à l'uranium appauvri ? Au bas mot, 80% des APFSDS utilisent des métaux inertes, tels que le tungstène.
2) Tenant compte de la censure militaire israélienne et dans l'hypothèse où l'obus serait à l'UA, pourquoi Tsahal laisserait passer une pareille photo dans un grand quotidien ?
3) Ah bon, Tsahal est de retour à Gaza et tire au canon dans la ville et personne ne s'en est aperçu ?
4) Depuis quand les APFSDS sont-ils utilisés en combat urbain ? Depuis que le Hamas dispose de divisions blindées ?
5) On appréciera le très PSYOPS mais néanmoins fascisant "pas de chambre à gaz dans Gaza mais un poison mortel"

L'analyse qui suit et qui reprend les canons du droit international est passable. Mais l'UA n'a jamais été qualifié d'arme inhumaine dans la Convention qui s'y relate. Au passage et d'un point de vue éthique, d'ailleurs, toute arme est foncièrement inhumaine : se faire tailler en morceau à la hache n'est pas spécifiquement plus sympathique que prendre une balle doum-doum...

Ce type d'article - au moins le site ne cache-t-il pas ses préférences et joue donc "cartes sur table" - contribue à brouiller un peu plus la distinction entre journalisme et militantisme. Si les deux sont éminnement respectables (quoiqu'en ce qui concerne un militantisme antisémite...), les mixer à outrance pose un sérieux problème de décrédibilisation du travail de gens honnêtes. De ce point de vue, je ne pense pas que ça rendra service ni à la liberté de la presse, ni à la liberté tout court...

mercredi 18 juillet 2007

La Corée du Sud, nouvel acteur de l'industrie de défense ?

L’industrie de défense sud-coréenne se développe rapidement et commence à engranger les succès à l’exportation, en particulier à l’égard de la Turquie. Ainsi, après avoir vendu plus de 30 appareils d’entraînement KT-1 à Ankara, Séoul finalise les négociations avec la Turquie sur la question de la production sous licence de son dernier char, le XK-2. On se souviendra, en effet, du programme de char turc de la 4ème génération (Cf. DSI n°9), dans lequel Nexter s’était fortement impliqué. Or, en vertu de la politique industrielle turque, tous les programmes d’armement conduits doivent pouvoir aboutir à renforcer le savoir-faire des industries de défense d’Ankara, via des transferts technologiques ou des productions sous licence.

D’autres programmes pourraient également être concernés par de telles coopérations, Séoul comptant in fine se positionner de façon très agressive sur les marchés de Défense. Les deux contrats représenteraient ainsi 540 millions de dollars, soit le second plus gros contrat jamais emporté par l’industrie de défense sud-coréenne (après la vente d’obusiers K-9 à la Turquie pour un milliard de dollars).

Refus de départ en mission en Afghanistan

Après que des paras britanniques aient refusé de partir en mission en évoquant un matériel défaillant, c’est au tour de combattants polonais. Onze soldats dont deux officiers ont refusé de partir en patrouille arguant du manque de blindage de leurs véhicules. Ils ont été renvoyés en Pologne – qui dispose de 1 200 soldats sur place – afin d’y être jugés.

Cette affaire se déroule dans le contexte très particulier de l’augmentation des attentats perpétrés par les Talibans, de l’augmentation du nombre de morts civiles causés par des frappes aériennes de l’OTAN mais aussi de l’augmentation des pertes alliées. Ainsi, le Canada a perdu 66 soldats depuis 2002… dont un tiers l’ont été depuis le début 2007.

mardi 17 juillet 2007

Money, money, money !

Vous aimez Abba ? Personnellement, je dois confesser que oui. Mais le célèbre « Money, money, money » est en train de prendre une signification très particulière dans les armées et devrait retentir dans les prochains mois aux oreilles de pas mal de monde. Sauf que l’on ne sera pas en discothèque mais dans un monde réel fait d’OPEX, de risques et de menaces. Bref, tous les ingrédients d’un excellent thriller de politique-fiction que l’on pourrait – tèrs grossièrement – résumer ainsi :

- Acte 1, des années 1980 à, grosso modo, 1994. Les matériels des forces armées sont vieillissants. Si de nouveaux matériels sont en développements, un certain nombre de décisions que l’on croyait prises (un second porte-avions, par exemple), sont remises aux calendes grecques pour cause de fin de guerre froide. Quelques commandes, comme celles du Leclerc, sont passées en croisant les doigts pour que les industriels ne pâtissent pas du nouvel environnement géostratégique et que les commandes à l’exportation suivent. Mais ça ne marche que très, très moyennement.

- Acte 2, de 1994 à, grosso modo, mai 2007. Après une (lente, disons de 97 à 2002) prise de conscience et des attentats de septembre 2001, les commandes s’accumulent. Mais le chef-comptable n’était pas très bon en mathématiques. Résultat, comme l’indique Alain Ruello dans Les Echos, un déficit de 30 milliards entre 2009 et 2013. Aouch…

- Acte 3, cette fois en coulisses. Si le chef comptable n’était pas bon, les comptables des armées – du moins une partie – avait détecté le pépin. S’engage donc une bataille fratricide où chaque armée défend son territoire, fait de commandes… et d’espoirs de commande. Pour la marine, ça signifie un porte-avions, 6 SNA Suffren, 17 frégates, des missiles de croisière, des torpilles, des missiles Aster et Exocet Block3, des NH90, des Rafale et des munitions. L’armée de l’air veut toujours ses 240 Rafale, ses A400M et aimerait que l’on s’occupe non seulement de ses ravitailleurs mais aussi du successeur du drone SIDM. L’armée de terre attend ses VBCI, ses PVP, aimerait enfin disposer d’une aéromobilité digne de ce nom (la disponibilité des Puma étant… comment dire ?), ses tenues FELIN, une numérisation et verrait plutôt d’un bon œil la poursuite des efforts d’urbanisation de ses engins. Surtout, elle aimerait qu’on reconnaisse que la plupart des gens qui sont au sol dans les OPEX sont… des terriens. Ce qui vaudra à Michel Goya de faire une sortie courageuse et argumentée – même si, comme d’habitude, je ne suis pas d’accord avec tout (mais c’est le cas pour tous les articles et livres que j’ai lu depuis les 20 dernières années, y compris les miens) – dans Politique Etrangère. Ca s’appelle avoir la culture du débat – même s’il est musclé.

- Acte 4, la neutralisation présidentielle. Les grandes chaleurs estivales me faisant rêver de piscines et autres fontaines, je me dis également que certains doivent être tentés d’utiliser un jet d’eau à haute pression que je m’interdis ici de citer. En clair, les décisions sont reportées après septembre, tout l’édifice conceptuel devant être repensé. Ce qui revient à dire que le futur Livre Blanc, bien plus que les questions de budgets et les défenses de prés-carrés matériels, sera déterminant. Il va donc y avoir du débat, du vrai, du débat destructeur et créateur, bref, du débat utile qu’on ne manquera pas de relayer dans DSI. En toute logique, le Livre Blanc c’est l’Alfa et l’Oméga : celui qui était alors candidat à la présidentielle l’avait même dit : « j’approuve entièrement votre analyse » (DSI n°24, p. 42). Merci Monsieur le Président !