mardi 25 août 2009

Lectures : Wired for War

Peter W. Singer, Wired for War. The Robotics Revolution and Conflict in the 21st Century, The Penguin Press, New York, 2009, 499 p.

D’emblée, l’ouvrage impressionne : parler en 500 pages de la robotique dans les opérations militaire là où David Axe (Warbots, Nimble Books, 2008) n’en écrivait que 88 ? Doit-on s’attendre à un inventaire à la Prévert portant sur les UAV, UCAV, USV, UGV, UGCV, et autres UUV ? Justement, non, bien au contraire.

Il s’agit bien ici d’un ouvrage d’analyse approfondie, des points de vue tactique, stratégique, historique, éthique, économique mais aussi philosophique et sociologique de l’art de la guerre robotisée. Pas ici question de plaidoyer « pro » ou « anti » : l’auteur, chercheur à la Brookings a qui l’on doit des ouvrages remarqués sur la privatisation de la guerre ou les enfants-soldats effectue une analyse minutieuse qui lui a pris des années.

Allant sur le terrain en Afghanistan ou en Irak, il montre comment les hommes en viennent, par exemple, à s’émouvoir parce que leur robot a subi une attaque. Au-delà des anecdotes, nombreuses, la plume légère et « à l’américaine » de l’intellectuel pousse à fond le concept de robotique, l’interroge et l’humilie au contact des réalités – sous oublier l’ombre portée d’une science fiction qui joue un rôle moteur dans ces développements.

Il s’agit bel et bien de voir jusqu’où, comment et sous quelles formes la robotisation va innerver les forces armées – certes américaines mais aussi alliées, et potentiellement, adverses. L’ouvrage, en ce sens, ne constitue qu’une petite pierre aux travaux portant sur les opérations futures mais les questions posées sont plus que pertinentes.

Si les réponses manquent parfois d’un peu de systématisme et d’esprit de synthèse, c’est aussi parce qu’elles restent ouvertes. Si vous vous intéressez à la technologie, à la robotique ou à la stratégie des moyens, cet ouvrage – une véritable bible sur la question – est manifestement fait pour vous. J.H.

6 commentaires:

A.g. a dit…

"Allant sur le terrain en Afghanistan ou en Irak, il montre comment les hommes en viennent, par exemple, à s’émouvoir parce que leur robot a subi une attaque."

Maintenant j'en suis sûr, ils ont perdus.

DaDouH a dit…

@ A.G.

Ça ne me choque pas, ce type de comportement, et à vrai dire ce n'est pas franchement nouveau.

Dans le milieu aéronautique et ce depuis toujours, il n'est pas rare d'entendre un pilote ou un mécano désigner l'avion par "elle". Ils en parlent comme des amoureux ou comme un maitre attentionné devant son chien ou son chat.
Je me souviens qu'un pilote d'essai de Super Hornet grattait le ventre de son avion en affirmant le plus sérieusement du monde qu'"elle" adorait ça. (Pour lui son F18 était un petit chaton espiègle et câline...^^")

Quand on passe des heures, quand on passe des jours même sur une machine, on fini par l'humaniser, on lui donne un nom et on lui prête un caractère.
Il me semble que les marins font ça aussi et depuis bien longtemps.

Je ne pense pas que ce soit propre à notre société technologique, c'est plus un besoin de l'humain à humaniser (ou du moins à rendre vivant) toute machine complexe avec qui il risque sa peau.


En tout cas, c'est un bouquin que je vais m'offrir pour noël. :D

Frédéric a dit…

DaDouh a tout a fait raison, AG ne devrait pas ètre étonner.

Faite seulememt un sondage sur le % de personnes qui parle a leur voiture ;)

A.g. a dit…

Vous avez raison ce n'est pas nouveau.
Et c'est toujours aussi inquiétant.
Le brouillage de repère émotionnel, compréhensible et normal vu la pression subie par un individu en zone de combat doit quand même être mieux bornée que çà, c'est un problème de commandement qui à terme peut considérablement nuire au moral général. Rajouter à la douleur des pertes humaines des émotions pour du matériel laisse vraiment songeur sur la stabilité en déploiement et plus encore au retour au pays.
Je ferai un parallèle avec le comportement ou la tenue, ce que vous pouvez acceptez en opération ne doit pas être tolérer en situation normale puisque cela contribue à faire la différence. Même principe avec les pertes/dégâts humain et matériel.

Anonyme a dit…

Dans les armées francaises actuelles il y a 30 000 personnel dans l'infanterie (en comptant les écoles).
Le reste (sauf les experts de la DGA et le renseignement soit 20 000 personnes) est du servant de matériels et le support associé et l'administratif d'ailleurs pléthorique(soit 270 000 personnes au total et donc 85% du personnel des armées).
Si une armée robotisée permet de réduire ces 270 000 personnes à 100 000 mais en démultipliant la puissance de feu et la mobilité de nos armées, tant mieux.
La capacité d'une armée repose sur le nombre de personnels de première ligne sur le terrain que personne ne songe à réduire en France, et les matériels dont les personnels que sont qu'une des composantes qui doit certes être efficace et adaptée en nombre.
Peut importe que l'armée francaise ou une autre armée ait 150 000 ou 300 000 personnels d'active.Ce qui compte c'est la capacité réelle sur le terrain.
Dommage qu'aussi peu de personnes le comprennent.
Un stratège qui aide l'Ema.

Anonyme a dit…

Mwouais. Etant légionnaire, il m'arrive d'être aussi dans "l'administratif pléthorique" en tant que secrétaire. Seulement voilà : le 3/4 de mon temps, je le passe avec mon poto le FAMAS à faire la même chose que mes camarades... en servant de bodyguard à mon capitaine.

D'autres sont cuisiniers ou mécaniciens. Sans nous, l'armée ne tourne pas : voulez-vous vraiment bouffer des rations pendant 4 mois d'Opex ? Voulez-vous que les notes de service ne sortent pas ? Elle sera belle, votre mobilité !

Descendez un peu dans les unités et quittez votre tour d'ivoire...