mardi 24 mars 2009

Carnets de voyage : DSI chez les Vikings

Hareng au petit déjeuner, soleil déjà bien levé à 06 h dans un grand ciel bleu et par –7°C, bienvenue dans le Norrland, en plein milieu de la côte nord du golfe de Botnie, Suède. Votre serviteur n’y est pas en pèlerinage sur les traces de Stieg Larsson mais bien en visite pour 48 heures chez Hägglunds, les concepteurs de la série des BV et du CV90. Au programme des journées, démonstrations dynamiques, débats et présentations en tous genre.

Les gens de la communication ont mitonné un agenda bien chargé et qui va, vraisemblablement, se révéler instructif. De facto, mon « accompagnateur », ancien colonel de l’armée suédoise est passé par le CID. Autant dire qu’à peine posé à Umea, on a parlé tactique, stratégie et opératique, valeur de Clausewitz et techno-guérilla. Bref, de quoi vous mettre en forme.

La stratégie des moyens suédoise a toujours été spécifique. Le niveau technologique a toujours été fortement imprégné de considérations stratégique, l’approche retenue est très synergistique. De fait, la Suède surprend : avec moins d’habitants que la Belgique (ce qui nous vaut de nos élites de nous faire qualifier de « petit pays »), elle a su développer une industrie florissante.

Un petit coup d’œil au passé et revoilà les images d’une industrie qui a été capable (et qui le reste) de développer ses propres chars, automoteurs d’artillerie et autres appareils de combat, sans compter le reste. Elle surprend aussi par une certaine forme d’opulence – comptez entre 6 et 7% de chômage -, malgré un modèle social extrêmement contraignant d’un point de vue fiscal.

Mais il faut également dire qu’ici, l’ancrage social-démocrate s’est traduit par un véritable culte de l’efficacité : alors qu’en Belgique, 28.000 fonctionnaires veillent au fisc (en ne rattrapant, d’ailleurs, qu’une toute petite fraction des milliards de la fraude fiscale), les finances ont ici un « payroll » de… 728 personnes. En dépit de la taille du pays (reportez sa longueur à celle de l’Europe, depuis l’Espagne : ça donne à réfléchir), les infrastructures sont parfaitement entretenues. Tout de suite, on mesure le chemin qu’il reste à parcourir…

Trêve d’économie politique, le programme du jour va porter sur le BVS10 Viking. L’engin articulé est sur les rangs pour un engagement en Afghanistan, où son cousin le BV-206S a déjà participé à des missions avec les Chasseurs alpins. Avec succès semble t’il : l’engin passe partout, est souple d’emploi et relativement léger. Suffisamment rustique aussi. Après tout, il a été conçu pour des opérations arctiques et les conditions qu’elles imposent.

Pas mal de questions me trottent en tête. On m’a promis pas mal de RETEX, des infos sur l'évolution du SEP (l'armée suédoise a stoppé sa participation mais Hägglunds poursuit le développement) et mes hôtes ont l’air plutôt enjoués à l’idée d’un bombardement de questions en règle. Le résultat sera à lire dans le prochain DSI-T ;o)

4 commentaires:

Anonyme a dit…

Beau voyage
C'est beau de découvrir un pays qui consacre 18% de son budget défense a la R&D (dont 5% à la R&T) et plus de 30% aux acquisitions d'armements neufs...contre respectivement 11% (dont 2 % R&T ) et 17% en France....nucléaire (et TVA) inclus.
Et oui, en Suède, on ne paye pas du rond de cuir comme dans la défense francaise mais des ingénieurs, ouvriers, officiers et soldats.54 000 rond de cuirs en trop chez nous officiellement...90 000 en réel.
La RGPP ne fait pas tous le chemin.
La Finlande vaut aussi le détour comme la Norvège.
Le jour ou la France dépensera aussi bien que la Suède on sera une très belle puissance militaire et sans augmenter les 36 Milliards du budget défense.
PI

Anonyme a dit…

Ah, si vous donnez plus d'infos que Raids (qui s'est largement planté dans un de leurs encadrés, à commencer par le nom même du véhicule...), on est preneur !

fransosen a dit…

connaissant bien le pays y ayant habité pendabt 30 ans je suis entièrement d'accord avec le portrait fait de son efficacité. N'oublions pas que c'est un pays fondamentalement social-démocrate, ce qui donne une bonne idée de ce que nos socialistes français fonctionarisés à outrance peuvent représenter dans les faits.

Mais il y a un "mais". La politique de défense de la Suède est basée sur un concept douteux de neutralité, ce qui a valu à la Suède une armée de 500 000 hommes dans les années 70 et de développer un armement propre et sophistiqué dont le Gripen est le meilleur exemple. Mais la neutralité suédoise est un mythe et a été basée sur un accord secret avec l'OTAN en cas d'attaque soviétique, ce dont les russes d'ailleurs n'étaient pas dupe. De plus l'incident du sous- marin russe "Whisky" à Karlskrona dans les années 80, a permis à une frange d'officiers droitisants de haut niveau de faire partir une vague d'incidents sous-marins qui n'étaient que de la frime et servaient deux buts : améliorer les rentrées d'argent dans les caisses de la Marine et permettre aux sous-marins US et Britanniques de s'entrainer dans les fjords, ceci à la barbe et au nez des parlementaires suédois y compris le leadership et de l'Etat tout court. Ce qui en gros est de la haute-trahison. Et il n'y a pas eu de vraies suites.

Cependant la chute du mur de Berlin a permis politiquement au leadership suédois (et du à la crise économique type celle actuelle des banques suédoises des années 90) de faire des coupes sombres dans le budget et de ramener l'armée de 500 000 hommes (qui d'ailleurs en était toujours au niveau WWII "amélioré") à... 12 000 hommes, toujours conscrits mais en pratique beaucoup plus professionnels. De plus du point de vue matériel la Suède ne fabrique plus de tanks (a acheté des Léopards d'occase aux Allemands), est obligée de coopérer avec la France pour l'avionique et les missiles car le Gripen sera certainement le dernier avion indépendant de SAAB, qui avec Volvo sont en train de se casser la gueule sans remède possible du à la faillite de ses proprios américains. Elle fabrique encore un excellent petit matériel et des sous marins classiques et certains navires high-tech.

En cas de conflit majeur où son territoire serait menacé, la Suède ne peut qu'espérer que l'OTAN vienne à la rescousse. Elle n'est qu'une force d'appoint à la Norvège et au Danemark dans la sphère géostratégique de l'Europe du Nord. Sinon elle peut envoyer des forces symboliques en OPEX dans des contextes type Tchad, Kosovo, Afghanistan etc...

Donc louanges pour l'efficacité de ses fonctionnaires oui, mais le reste "är inte mycket att hänga i julgranen" (expression suédoise qui littéralement veut dire "pas beaucoup pour décorer l'arbre de Noël" = pas de quoi en faire un flan).

Anonyme a dit…

Pourquoi en Belgique on arrive pas à suivre des pays comme la Suède et à adopter leur modèle ? On fait pitié et j'ai de plus en plus honte de ma nationalité.