Il y a quelques jours, le colonel Luc Gennart, commandant la base belge de Florennes, a fait une sortie très inhabituelle dans les médias, extrêmement rares étant les officiers qui, ces 10 dernières années, se sont exprimés dans les débats politiques belges. Il y argue d'un processus de flamandisation des postes de responsabilité de l'armée mais aussi de projets visant à la fermeture de la base de Florennes. Le lecteur peut trouver les rétroactes et autres déclarations liées à l'affaire.
Le ministre y voit du "bla-bla-bla", ce qui n'est tout de même guère brillant comme réponse. Alors, qu'en penser ? Juste quelques éléments :
- Florennes est effectivement menacé - et sérieusement. La base accueille une escadre de F-16 et, vers 2020, ces appareils quitteront peu à peu le service. Il n'y a aucun consensus politique sur le seul remplacement de la capacité "appareils de combat" dans le paysage politique belge. Ne resteraient sur place que les drones B-Hunter. Mais maintenir Florennes pour une douzaine de drones relève de l'hérésie économique ;
- Et les NH ? Les nouveaux hélicoptères seront basés à Beauvechain, plus près de la frontière linguistique mais... plus loin de leur zone d'entraînement. En fait, juste au sud de Florennes se trouve l'une des plus importantes zones d'entraînement d'Europe... et où sont situés, à peu près au milieu, les Chasseurs ardennais de Marche en Famenne. Soit les utilisateurs potentiels desdits NH. Sois dit en passant, ceux qui ont gentiment poussé en avant l'option du positionnement à Florennes des hélicoptères ont pu avoir quelques problèmes dans leurs promotions ;
Plus largement, y-a-t'il "flamandisation" ? Je ne peux pas m'exprimer sur les tests linguistiques, les taux de réussites des francophones ou les décisions prises en matière de tableau d'avancement : je ne les connais pas. Ceci dit, juste deux remarques.
Premièrement, s'il y a beaucoup d'officiers généraux flamands dans les forces actuellement et que certains francophones peuvent se considérer comme défavorisés, il faut constater que, passé un certain cap dans les grades, l'armée est politisée. Pour le dire autrement, chaque ministre (et P. De Crem est loin d'être le premier) place "ses" hommes aux postes-clés - ce qui contribue au demeurant à les rendre plus prudents et à réduire leur potentiel d'innovation.
Deuxièmement il y a une géopolitique intra-belge du positionnement des forces - tous les partis politiques le savent et ces choses se négocient. Elle répond à des considérations économiques (une base est un gisement d'emplois et les élus locaux y sont évidemment sensibles) mais aussi communautaires et politiques, en particulier depuis les années 1990 : une base de F-16 en Flandre et une en Wallonie ; le transport en Flandre juste à côté de Bruxelles ; et l'entraînement en Wallonie, juste à côté de la Flandre, ce n'est pas tout à fait un hasard. Or, cet équilibre est remis en question par les coupes budgétaires à répétition imposées par le politique lui-même.
Qu'en disent les militaires ? L'armée belge est la dernière institution réellement unitaire du pays : pour être officier, vous devez être bilingue. La culture de l'institution est elle-même unitaire. Nombre de gars, francophones ou néerlandophones, vous diront qu'ils ne comprennent pas ces conflits communautaires et que les armées n'y sont pas sensibles. Même si n'est pas tout à fait vrai - des tensions peuvent parfois se ressentir - force est aussi de constater que la question de la "rupture des équilibres" est une question importée dans les armées par le politique, le tout dans un contexte ou, pour des raisons historiques, la Flandre a un positionnement pacifiste et peu enclin à soutenir l'armée.
Florennes ne serra jamais fermé a cause de l'équilibre communautaire, comme vous l'indiquez. Si une base aérienne est menacé c'est bel et bien Koksijde ou les NH-90 seront déployées depuis Beauvechain. Beauvechain était presque vide, c'est moin coûteaux que de batir une nouvelle base nord de Bierset. Secundo avec les B-Hunter utilisé pour patrouille maritimes.
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