Quelques remarques sur la (ré)émergence du concept d'opérations distribuées chez les Américains et les Australiens, en réponse à Mars attaque qui revenait sur les commandos Chouf.
D'abord, il convient de bien comprendre que l'apparition d'un concept quelque part n'augure pas automatiquement de son acceptation ailleurs. En clair, l'expérience algérienne, si elle a été examinée par les Américains, n'en est pas pour autant avalisée tel quel : le poids de la culture stratégique importe.
Ensuite, le contexte algérien lui-même est spécifique et les leçons apprises ne sont pas totalement transposables au contexte afghan. Le contexte stratégique est radicalement différent : nombre de combattants eux-mêmes ne voient pas pourquoi ils sont engagés en Afghanistan. Le conflit manque cruellement de sens, à commencer aux yeux du niveau politique, en Europe.
Le contexte en termes de stratégie des moyens est également différent : les technologies utiles aux opérations distribuées "old fashioned" ne sont pas celles qui ont été privilégiées par les armées actuelles. Le manque d'hélicoptères sur le théâtre afghan n'en est que l'illustration la plus flagrante.
Le contexte opérationnel est également différent. La barrière de la langue existait en Algérie mais est nettement plus infranchissable (du moins, sans interprètes) en Afghanistan. La barrière en termes tactique est également à prendre en considération : les opérations d'aujourd'hui sont nettement plus centralisées, le commandement réclame toujours plus d'infos. En même temps, la nature et l'application des règles d'engagement est toute autre. Songez qu'en Allemagne, l'équivalent local du CEMA a du démissionner, conséquence ultime de l'affaire des camions citernes capturés par les talibans...
Toujours dans le registre tactique, la morphologie de l'adversaire n'est évidemment pas la même ; les méthodes inhumaines sont à éliminer définitivement et, pire que tout, chaque action tactique peut se trouver étalée le lendemain dans la presse et susciter un interventionnisme mal à propos du niveau politique.
En bref, s'il faut évidemment conserver les leçons acquises en matière de commandos Chouf ou de chasse, il faut aussi les adapter, sans quoi un "copié-collé" sera immanquablement voué à l'échec. La clé, évidemment, reste l'adaptation. Aussi, peut-on réellement en vouloir aux Américains ou aux Australiens de chercher à faire avancer les choses ? En particulier dans un contexte où il ne s'agit pas uniquement de penser face à l'urgence mais aussi de comprendre les ressorts des futures formes d'insurrection et de guérilla ?
L'obstacle ne vient il pas de l'effacement des barrières entre mission de police et militaire, dans les moyens, le milieu et les mentalités ? La guerre au sein des populations et la montée en "qualité" de la délinquance qu'elle qu'elle soit n'ont t elles pas brouillées les frontières psy des populations et donc des décideurs et des acteurs de terrain qui nuisent au forces civiles ou militaires et plus particulièrement sur le territoire afghan. En terme d'image un policer en France en maintien de l'ordre, tout équipé (casques, gilet d'intervention,lanceur de balle de défense 40mm) , dans une cité, n'a plus beaucoup de différence avec un fantassin en patrouille à Kaboul (que l'on équipe aussi pour le contrôle de foule au kosovo) si ce n'est l'absence de fusil et la couleur. Cet amalgame ajouté au fait que l'ennemi ne se distingue pas de la population par un uniforme, n'est il pas le réel obstacle à une réussite militaire trompant le public sur les actions potentielles des militaires, réticent à celle-ci. Le problème n'est il pas dans la population des pays occidentaux plus que sur le théatre des opérations ?
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