Frank Hoffman fait partie de ces jeunes auteurs talentueux qui émergent aux Etats-Unis et qui, malgré leur jeunesse, ont un impact direct et important sur les nouvelles doctrines. En l’occurrence, Hoffman est lié aux Marines et a joué un rôle considérable dans l’émergence du concept de « guerre hybride » à présent au cœur des conceptions des « nuques de cuir » et, par effet-miroir, du « peristent conflict » de l’Army.
Dans Conflict in the 21st Century. The Rise of Hybrid Wars, une monographie assez dense, l’auteur explicite plus avant son concept et formalise conceptuellement ce qu’il considère comme la « guerre du futur ». Elle sera menée par des Etats ou des entités non-étatique, extrêmement violente (mais au cours d’opérations de stabilisation ou de rétablissement de la paix), complexe à mener, longue et sans aucune restriction.
Elle fera aussi feux de tous bois, les adversaires n’ayant plus aucune restriction d’ordre éthique, moral, juridique ou religieuse. Les moyens, dans cette optique, sont appelés à se diversifier. Ainsi, le « guerrier hybride » pourrait tout aussi bien se déplacer sur un âne tout en téléphonant avec un Turaya et en gardant, à côté de sa Kalashnikov vieille de 30 ans, un RPG-29. Aussi apocalyptique que Girard, la vision est néanmoins moins hallucinante (voire hallucinée).
Le propos est clair, les références nombreuses et le travail, précis et comprenant cette petite touche d’académisme – point trop n’en faut – qu’il manque souvent aux publications européennes continentales. Mais, en fait, Hoffman en revient de la sorte à une juste vision de ce que devrait être le spectre des conflits. Capitalisant sur Krulak – son « caporal stratégique » comme sa « guerre des trois pâtés de maisons » - l’auteur indique qu’il faudra tout savoir faire.
De ce point de vue, la guerre « traditionnelle » et conventionnelle ne sera pas éliminée. Mais l’émergence des guerres hybrides rend nettement plus complexe la planification comme la conduite des opérations. Il s’appuie ainsi sur l’expérience israélienne de 2006 – évidemment dérangeante parce qu’elle bouscule nos croyances (notre excessif appui sur la technologie comme sur nos vieilles structures présente tellement de signes d’une foi religieuse…) – et l’on regrettera sans doute qu’il n’ait pas pris en compte d’autres conflits.
Mais, chercheur pragmatique, Hoffman pousse plus loin son raisonnement et pose quelques réponses. L’entraînement et la formation sont cruciales. Le renseignement est absolument déterminant : plus que technologique, il doit être humain et culturel. L’agilité organisationnelle et matérielle – cette faculté d’adapter nos équipements pour des missions pour lesquels ils n’ont jamais été conçus – est considérée comme une posture de départ.
On le comprendra, Hoffman ouvre des portes qui seront dérangeantes pour nos armées. Mais qui ont également toutes les chances de devoir être empruntées. Aussi n’est-il pas étonnant de le voir batailler sur la notion de l’ethos : à la guerre, les perceptions sont plus importantes que les « effets cinétiques ».
" Il s’appuie ainsi sur l’expérience israélienne de 2006 – évidemment dérangeante parce qu’elle bouscule nos croyances (notre excessif appui sur la technologie comme sur nos vieilles structures présente tellement de signes d’une foi religieuse…) "
RépondreSupprimerCe n'est pas un excessif appui sur la technologie mais un manque de technologie pour parer ces nouvelles menaces.
On en va pas revenir aux vagues d'assaut humaines.
Le danger des techno-guerillas et de la diffusion de moyens technologiques pour des stratégies asymétrique était prévisible depuis 20 ans.
C'est le mépris de l'adversaire sensé n'etre qu'un amateur fanatique armé d'armes désuètes qui a conduit a cela.
Demain des groupes ou etats utiliseront au maximum des moyens techniques disponibles pour contrer nos forces conventionnelles et nous infliger le maximum de pertes.
Eux aussi auront du C4ISR, de la vision nocturne, des missiles portables sophistiqués, des missiles balistiques capable de neutraliser nos aérodromes, des mines intelligentes...
Sans compter qu'ils ne respectent pas les lois de la guerre alors meme que nos forces ont de plus en plus de contraintes.
On sait que les armes cluster, les dispenseur de mines, et les sous munitions intelligentes ont un effet énorme et on les interdit pour nous.
Le Hezbollah tirait un missile puis se mettait a l'abris de suite, neutralisant les ripostes aériennes.
Il est évident que des armes a dispersion lancant des mines intelligentes explosant quand il ressortaient de leur trous auraient été tres utiles.Mais voila, c'est mal vu en occident.