jeudi 4 novembre 2010
Le CEMA belge a remis sa démission
Et le ministre l'a refusé. D'où, apparement, les étonnantes déclarations qu'il a ensuite tenu en conférence de presse.
dimanche 31 octobre 2010
Belgique : les étonnantes déclarations du général Delcour
Suite de l'affaire Gennart : le Conseil d'Etat a cassé la décision de muter le colonel. Vous trouverez tout ça dans la presse belge. Cependant, prenant position, le CEMA belge a lancé un (très gros) pavé juridico-politico-éthique. Pour lui, il est deveniu difficile pour l'armée belge de prendre des mesures d'ordre et disciplinaires dans le cadre légal actuel. Aussi, "Notre déontologie militaire et nos normes d'ordre et de discipline semblent devenues incompatibles avec les lois, ou avec les conventions signées par la Belgique".
L'obéissance à l'autorité politique est, avec le respect du droit, la fondation première de nos armées européennes. C'est vrai en opération mais aussi en temps de paix. Mais que fait on si une armée est sciamment - mais discrètement - démantellée, à l'insu même du politique (qui, pour l'essentiel et en Belgique, s'en fiche) ? N'a-t-on pas le droit de refuser un ordre (soit, pour le colonel Gennart, la boucler) illégal ou a tout le moins politiquement problématique ? Le militaire n'est-il pas le serviteur de l'Etat avant même d'être l'opérateur des règlements disciplinaires ?
Dans le même temps, qu'un CEMA voit en des normes légales internationales et nationales un problème, personnellement, ça m'en pose un. En particulier lorsque celui qui prête serment "jure d'observer les lois et la constitution"
L'obéissance à l'autorité politique est, avec le respect du droit, la fondation première de nos armées européennes. C'est vrai en opération mais aussi en temps de paix. Mais que fait on si une armée est sciamment - mais discrètement - démantellée, à l'insu même du politique (qui, pour l'essentiel et en Belgique, s'en fiche) ? N'a-t-on pas le droit de refuser un ordre (soit, pour le colonel Gennart, la boucler) illégal ou a tout le moins politiquement problématique ? Le militaire n'est-il pas le serviteur de l'Etat avant même d'être l'opérateur des règlements disciplinaires ?
Dans le même temps, qu'un CEMA voit en des normes légales internationales et nationales un problème, personnellement, ça m'en pose un. En particulier lorsque celui qui prête serment "jure d'observer les lois et la constitution"
DAMB : perceptions et contre-perceptions
La discussion sur les DAMB avec Olivier se poursuit (voir sa réponse à la mienne ici). Alors, effectivement, je le rejoins - c'est le point de vue du stratégiste - sur le caractère hasardeux de la notion d'ADM, ce que j'avais souligné dans plusieurs de mes articles.
C'est certes une construction méthodologiquement fausse - qui procède d'intérêts bien compris - mais le politologue, cette fois, à également son point de vue. Le problème principal de notre temps est la perception faussée qu'à le politique de la chose stratégique. Je ne m'étendrai pas plus, vous savez toutes et tous de quoi je veux parler. A ce stade et pour en revenir aux DAMB, la question revient à "comment le politique va-t-il réagir" face à une attaque B, C ou R ? Réagir et perceptions : les deux mots sont clés en politique...
Cette question est d'autant plus importante que, là aussi, le balistique n'est pas seul en cause (d'autant plus que "balisticer" ce type d'agents est pour le moins complexe). Menace chimique il y a. Mais, là aussi, les vertus de la dissuasion nucléaire sont nombreuses, en particulier face aux Etats, tout de même sensés (sensés, j'ai bien dit...) adhérer à la CAC et à ses mécanismes de contrôle. Lorsqu'ils ne le font pas, ils sont dans une stratégie de compensation nucléaire, comme dans le cas syrien et iranien pour l'heure : leurs doctrines sont clairement d'ordre dissuasives et ils savent parfaitement à quoi s'attendre s'ils glissent sur des conceptions d'emploi.
La vraie menace chimique me semble nettement plus vivace en matière de "C-IED", des agents chimiques rustiques, tels qu'utilisés en Irak (17 incidents, voir le dossier que j'avais préparé pour DSI-T n°18, l'année passée). Or, ces C-IED sont en dessous du balistique/ABM. On en revient au questionnement d'hier : celui qui se dote de balistique est celui qui accepte les règles du jeu et le mûrit. Celui qui n'accepte pas les règles du jeux développera des stratégies alternatives de contournement. Or, ce n'est pas sur celles-là que nous nous concentrerons.
Je ne suis par contre pas d'accord sur l'air comme seul moyen de fappe à distance : 300 000 conteneurs voguent chaque jour sur les océans, 50 000 entrent quodiennement aux US et un bon paquet (sans doute plus) en Europe. Or, il est impossible de tout contrôler. Même dans les airs et à une échelle bien moindre, l'affaire de l'imprimante yéménite et d'UPS de ces derniers jours montre bien qu'il est possible de passer outre notre supériorité. Surtout, notre supériorité aérienne, face à des frappes de drones ou plus classiques est transitoire : dans 15 ans, les forces aériennes européennes auront beaucoup moins d'appareils qu'aujourd'hui - j'ai fait les comptes pour un chapitre d'ouvrage à paraître. Nos adversaires potentiels jouent la carte de la quantité et il est douteux que nos qualités technologiques puissent, à terme, parvenir à contrer la première. Surtout dès lors que la stratégie aérienne connaît une véritable révolution : traditionnellement offensive, elle passe, de notre point de vue, en défensif (je m'en explique dans le dernier Histoire et Stratégie).
Sur la R&D/R&T et la DAMB comme moteur : c'est ainsi que la SDI américaine a fonctionné (et c'est d'ailleurs là où elle a été efficace). Mais les budgets US ne sont pas les budgets européens et l'expérience US n'est pas transposable à la France. En faisant ainsi, on pérénise le problème traditionnel du déficit du financement en recherche techno et on le cache sous les oripeaux de la DAMB. Problème n°1 : dans nos systèmes de contrôles parlementaires, ce n'est pas idéal ; n°2 : on ne résoud le problème structurel de la R&D que de manière temporaire (parce que ça ne durera pas 20 ans...) ; n°3 : on induit l'illusion d'un possible ; n°4 : on divertit ces fonds de recherches qui seront utiles à nos soldats et qui offriront de réelles possibilités export à nos industriels.
Bref, un jeu dangereux : en DAMB, nous avons un retard important sur les Américains, des financements inférieurs et des intérêts qui ne sont pas les mêmes. Pourquoi chercher à les imiter ? Le politique est certes souverain mais il faut aussi savoir lui donner toutes les cartes (et pas uniquement une vision particulière) pour qu'il puisse prendre la bonne décision et qu'il ait... une bonne perception.
Et quant à chercher à impressioner le grand frère, je suis d'accord sur l'analyse. Par contre, ce positionnement pourrait bien nous conduire sur le chemin de soumission : ne nous leurrons pas, les budgets de défense n'augmenteront pas d'ici à 2020. Se focaliser sur une DAMB de territoire (car certains jouent de l'ambiguité entre territoire et théâtre) va conduire à nous détourner de nos capacités à effectivement faire la guerre, et bien la faire. Et nous seront d'autant plus dépendants de Washington...
C'est certes une construction méthodologiquement fausse - qui procède d'intérêts bien compris - mais le politologue, cette fois, à également son point de vue. Le problème principal de notre temps est la perception faussée qu'à le politique de la chose stratégique. Je ne m'étendrai pas plus, vous savez toutes et tous de quoi je veux parler. A ce stade et pour en revenir aux DAMB, la question revient à "comment le politique va-t-il réagir" face à une attaque B, C ou R ? Réagir et perceptions : les deux mots sont clés en politique...
Cette question est d'autant plus importante que, là aussi, le balistique n'est pas seul en cause (d'autant plus que "balisticer" ce type d'agents est pour le moins complexe). Menace chimique il y a. Mais, là aussi, les vertus de la dissuasion nucléaire sont nombreuses, en particulier face aux Etats, tout de même sensés (sensés, j'ai bien dit...) adhérer à la CAC et à ses mécanismes de contrôle. Lorsqu'ils ne le font pas, ils sont dans une stratégie de compensation nucléaire, comme dans le cas syrien et iranien pour l'heure : leurs doctrines sont clairement d'ordre dissuasives et ils savent parfaitement à quoi s'attendre s'ils glissent sur des conceptions d'emploi.
La vraie menace chimique me semble nettement plus vivace en matière de "C-IED", des agents chimiques rustiques, tels qu'utilisés en Irak (17 incidents, voir le dossier que j'avais préparé pour DSI-T n°18, l'année passée). Or, ces C-IED sont en dessous du balistique/ABM. On en revient au questionnement d'hier : celui qui se dote de balistique est celui qui accepte les règles du jeu et le mûrit. Celui qui n'accepte pas les règles du jeux développera des stratégies alternatives de contournement. Or, ce n'est pas sur celles-là que nous nous concentrerons.
Je ne suis par contre pas d'accord sur l'air comme seul moyen de fappe à distance : 300 000 conteneurs voguent chaque jour sur les océans, 50 000 entrent quodiennement aux US et un bon paquet (sans doute plus) en Europe. Or, il est impossible de tout contrôler. Même dans les airs et à une échelle bien moindre, l'affaire de l'imprimante yéménite et d'UPS de ces derniers jours montre bien qu'il est possible de passer outre notre supériorité. Surtout, notre supériorité aérienne, face à des frappes de drones ou plus classiques est transitoire : dans 15 ans, les forces aériennes européennes auront beaucoup moins d'appareils qu'aujourd'hui - j'ai fait les comptes pour un chapitre d'ouvrage à paraître. Nos adversaires potentiels jouent la carte de la quantité et il est douteux que nos qualités technologiques puissent, à terme, parvenir à contrer la première. Surtout dès lors que la stratégie aérienne connaît une véritable révolution : traditionnellement offensive, elle passe, de notre point de vue, en défensif (je m'en explique dans le dernier Histoire et Stratégie).
Sur la R&D/R&T et la DAMB comme moteur : c'est ainsi que la SDI américaine a fonctionné (et c'est d'ailleurs là où elle a été efficace). Mais les budgets US ne sont pas les budgets européens et l'expérience US n'est pas transposable à la France. En faisant ainsi, on pérénise le problème traditionnel du déficit du financement en recherche techno et on le cache sous les oripeaux de la DAMB. Problème n°1 : dans nos systèmes de contrôles parlementaires, ce n'est pas idéal ; n°2 : on ne résoud le problème structurel de la R&D que de manière temporaire (parce que ça ne durera pas 20 ans...) ; n°3 : on induit l'illusion d'un possible ; n°4 : on divertit ces fonds de recherches qui seront utiles à nos soldats et qui offriront de réelles possibilités export à nos industriels.
Bref, un jeu dangereux : en DAMB, nous avons un retard important sur les Américains, des financements inférieurs et des intérêts qui ne sont pas les mêmes. Pourquoi chercher à les imiter ? Le politique est certes souverain mais il faut aussi savoir lui donner toutes les cartes (et pas uniquement une vision particulière) pour qu'il puisse prendre la bonne décision et qu'il ait... une bonne perception.
Et quant à chercher à impressioner le grand frère, je suis d'accord sur l'analyse. Par contre, ce positionnement pourrait bien nous conduire sur le chemin de soumission : ne nous leurrons pas, les budgets de défense n'augmenteront pas d'ici à 2020. Se focaliser sur une DAMB de territoire (car certains jouent de l'ambiguité entre territoire et théâtre) va conduire à nous détourner de nos capacités à effectivement faire la guerre, et bien la faire. Et nous seront d'autant plus dépendants de Washington...